Nous avons tous souffert de l’apprentissage par coeur lorsque nous sommes passés sur les bancs de l’école. Vous vous souvenez des poèmes et des événements historiques qu’on essayait de faire rentrer dans notre cerveau à force de répétitions ? 😣
Ces mauvais souvenirs ont détruit la réputation de cette méthode d’apprentissage. La méthode de l’apprentissage par cœur pourtant des effets positifs sur le cerveau, que l’on soit tout jeune sur les bancs de l’école ou que l’on soit senior et qu’on souhaite protéger ses capacités cognitives.
Dans la langue anglaise, il existe un autre nom pour l’apprentissage par coeur : drilling ou forage. A mon avis, cela permet de se créer une représentation visuelle peu flatteuse de cette méthode, mais à la hauteur de ce que vit celui qui essaie d’apprendre quelque chose par cœur. 😉
Cette méthode a été utilisée dans les salles de classe du monde entier pour enseigner aux jeunes enfants des notions de base telles que l’alphabet et les tables de multiplication. Les étudiants plus âgés utilisent l’apprentissage par coeur pour encoder une série de faits aussi divers que les éléments du tableau périodique et les dates des événements historiques.
L’apprentissage par coeur peut être utilisé pour former des bases permanentes sur lesquelles repose l’apprentissage ultérieur.
L’apprentissage par coeur est également utilisé pour « bachoter » temporairement des informations en vue d’un examen. Mais, dans ce cas, ces informations s’effaceront rapidement de la mémoire parce qu’elles n’auront été utilisées, au mieux, qu’une seule fois.
Comme l’apprentissage par coeur s’imprime par la répétition plutôt que par un réel processus d’apprentissage, elle est souvent comparée et opposée défavorablement aux méthodes qui font appel à l’association et à la compréhension, comme l’apprentissage associatif ou l’apprentissage actif.
Lorsqu’elle est bien appliquée, la mémorisation par cœur est pourtant une méthode très utile pour apprendre de façon permanente des informations de base qui ne nécessitent pas de compréhension. Elle est cependant moins efficace dans les situations nécessitant la compréhension de théories complexes ou dans des domaines qui exigent une réflexion de haut niveau.
La méthode de l’apprentissage par cœur : comment ça fonctionne ?
La méthode de l’apprentissage par coeur implique le simple stockage de données dans le cerveau, sans aucun besoin ou tentative de compréhension.
La théorie sous-jacente à la mémorisation par cœur est que plus une information est répétée, plus elle peut être rappelée facilement et automatiquement sans qu’il soit nécessaire d’y réfléchir. Cette méthode permet de constituer ce qui est considéré comme une base fondamentale de connaissances qui est alors disponible de manière fiable pour poursuivre un apprentissage de niveau supérieur.
Il n’est donc ici question que de stocker l’information, sans s’assurer que leur signification est comprise, ou même sans compréhension de la raison pour laquelle il est utile de connaître l’information apprise.
Je vais prendre un exemple concret : si on apprend les tables de multiplications à un enfant. La méthode de l’apprentissage par coeur consiste simplement à les faire répéter jusqu’à ce qu’elles soient apprises. D’autres méthodes essaieraient par contre de faire comprendre leur fonctionnement et de montrer l’utilité des tables de multiplication en fournissant des exemples concrets auxquels l’enfant pourrait s’identifier.
Les limites de l’apprentissage par cœur
L’apprentissage par coeur utilise la répétition. Bien que cette méthode fonctionne pour les faits simples et immuables tels que les noms de villes ou les mots d’un poème, elle peut être moins utile dans les domaines qui nécessitent une compréhension ou des associations.
Des chercheurs de l’université de Californie à Irvine ont découvert que plus le cerveau est exposé à des informations pouvant être interprétées, plus il est probable que des détails non factuels soient modifiés, ajoutés ou retranchés. En effet, la partie du cerveau dans laquelle nos souvenirs sont basés peut essayer de créer de nouveaux souvenirs, différents ou faux, à partir de souvenirs existants qui sont similaires.
Cela peut être dû au fait qu’à chaque fois que le souvenir est rappelé, le cerveau se concentre sur un aspect légèrement différent de celui-ci. Avec des souvenirs tels que les tables de multiplication qui n’ont pas de détails mutables, ce n’est pas un problème, mais lorsque la compréhension est nécessaire, la mémorisation par cœur est limitée par ce phénomène.
Par conséquent, l’apprentissage par coeur peut être utilisé comme base mais doit être soutenu par un apprentissage associatif ou actif. (article de Open College)
Différence entre “se souvenir” et “comprendre”
La controverse sur l’apprentissage par coeur porte sur la question de savoir si le but est de se souvenir ou de comprendre.
Si le but de la mémorisation est la simple rétention de l’information, l’apprentissage par cœur peut être extrêmement efficace, mais si le but est de transférer ce qui est appris afin de résoudre de nouveaux problèmes, alors l’apprentissage par coeur ne peut être utile que comme étape initiale.
L’apprentissage par coeur fournit la capacité de se souvenir et s’appuie sur les processus cognitifs de reconnaissance ou d’identification et de rappel. En revanche, la compréhension permet de transférer ce qui a été mémorisé et d’ajouter des processus cognitifs tels que l’interprétation, la classification, la déduction, la comparaison, l’évaluation et l’explication.
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Apprentissage par coeur et développement du cerveau
Une étude menée à la faculté de médecine de l’université de Stanford suggère que la mémorisation par cœur pourrait avoir un impact sur le développement du cerveau des jeunes enfants.
Des scanners cérébraux effectués sur des enfants qui passent de compétences simples, comme compter sur leurs doigts, à la mémorisation de tables de multiplication, ont montré que ce changement de capacité s’accompagne de modifications physiques dans l’hippocampe. L’hippocampe, qui est responsable de la mémoire, assume alors une responsabilité accrue (en provenance du cortex préfrontal et pariétal).
Pourquoi ces changements physiques ont-ils alors lieu dans le cerveau ? Tout simplement parce qu’il est en train de se réorganiser pour répondre aux demandes plus complexes qu’il reçoit. Et il élimine ses propres processus les moins efficaces pour l’apprentissage et pour la résolution de problèmes.
Cela suggère que le recours à la méthode de l’apprentissage par coeur pour acquérir des connaissances telles que l’alphabet ou les mathématiques peut constituer une base importante pour des stratégies de raisonnement et d’apprentissage supérieures.
Selon les auteurs de l’étude, le rôle accru que prend l’hippocampe à mesure que la pensée stratégique se développe « est cohérent avec son rôle connu dans l’apprentissage et la l’encodage de la mémoire ainsi et le rappel des faits et des événements. » Les auteurs indiquent également que le rôle important que joue l’apprentissage par cœur est « limité dans le temps » et que les connaissances en mathématiques et en langage de base finissent par se consolider dans d’autres zones du cerveau. (l’article, en anglais, du National Post sur le rôle crucial de l’apprentissage par cœur)
Apprentissage par cœur et amélioration de la santé cérébrale chez les seniors
Bien que la méthode de l’apprentissage par cœur soit devenue une méthode controversée et de plus en plus désapprouvée dans les milieux éducatifs, elle pourrait offrir des avantages importants, en termes cognitifs, pour les personnes âgées.
Une étude datée de 2006 a montré que les personnes âgées pouvaient améliorer leur mémoire et, en particulier, leur mémoire des mots en s’engageant dans une période d’apprentissage par cœur intensive suivie d’une période de repos tout aussi longue.
Les recherches ont été menées par Jonathan McNulty, de l’école de médecine et des sciences médicales de l’université de Dublin. Avec ses collaborateurs, ils ont étudié un groupe de 24 adultes en bonne santé, âgés de 55 à 70 ans, pendant six semaines, en leur demandant à chacun de mémoriser soit un article de journal, soit un poème de 500 mots.
Après la mémorisation intensive, ils se sont reposés pendant six semaines et ont ensuite été soumis à un test de mémoire.
En expliquant leurs résultats, McNulty déclare : « Nous n’avons pas constaté d’amélioration immédiate après la période de mémorisation intensive. Cependant, après un repos de six semaines, les volontaires ont manifesté à la fois des changements métaboliques dans le cerveau et une amélioration des performances de mémoire. »
En plus de passer des tests approfondis de mémoire et d’apprentissage avant et après la période d’apprentissage, le groupe s’est également soumis à une spectroscopie par résonance magnétique avant et après l’apprentissage et après la période de repos de six semaines.
Bien qu’aucun changement n’ait été constaté dans le métabolisme cérébral ou les performances de la mémoire immédiatement après la session d’apprentissage, des améliorations ont été constatées à la fois dans les tests et les scans après la période de repos. Chaque participant était mieux à même de se souvenir d’événements et de mémoriser et répéter des listes de mots ou de courtes histoires, et chacun présentait des changements métaboliques dans l’hippocampe postérieur gauche, la partie du cerveau liée à la mémoire.
Que faut-il retenir sur l’apprentissage par coeur ?
Si on devait utiliser une métaphore pour se représenter ce qu’est réellement l’apprentissage par cœur, ce serait les fondations d’une maison. Une fois que les fondations sont solidement réalisées, on peut construire la maison. C’est pareil pour l’apprentissage.
L’apprentissage par cœur est la méthode la plus efficace pour constituer les fondations de la connaissance. Il faut consolider ces fondations, s’assurer qu’elles restent solides. Surtout au jeune âge et au grand âge.
J’ai regroupé ici mes articles sur la mémoire chez les seniors.
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