L’activité physique et la santé du cerveau

Au fur et à mesure que je prends de l’âge, je m’inquiète forcément des éventuels signes d’un déclin cognitif (sans pour autant être anxieux). Je me suis donc plongé dans des tas d’articles sur le cerveau. Il en résulte que l’activité physique et la santé du cerveau sont liées…

Dans cet article, je vais vous montrer les données scientifiques qui existent sur les effets de l’exercice physique sur le cerveau. Que celui-ci soit sain, qu’il ait déjà subi un accident (comme un AVC) ou qu’il montre des signes de déficience, l’exercice physique est bénéfique pour le cerveau.

Cet article est très technique et peut être rébarbatif, donc, cliquez sur les liens si vous voulez connaître les effets de l’activité physique sur un cerveau sain ou sur un cerveau endommagé.

A côté de l’activité physique, j’évoque aussi ce que la science dit sur l’entraînement cognitif avant de conclure par ce que nous pouvons faire pour la bonne santé de notre cerveau.

L’activité physique et la santé du cerveau
L’activité physique et la santé du cerveau

La physiologie de l’exercice physique

Les différents niveaux d’intensité de l’activité physique

L’activité physique quotidienne est définie en termes de dépense énergétique quotidienne totale sous forme de calories brûlées chaque jour. Elle est généralement calculée à partir du nombre moyen de pas effectués par une personne au cours d’une journée. Un style de vie sédentaire se définit par un nombre de pas inférieur à 5 000 par jour.

Supposons qu’une personne fasse une petite course ou une marche rapide et qu’elle passe le reste de la journée assise, totalisant ainsi moins de 5 000 pas. Cette situation est encore considérée comme sédentaire. Un mode de vie actif est généralement défini comme égal ou supérieur à 7 500 pas par jour.

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit l’inactivité physique comme le fait de pratiquer moins de 150 minutes d’activité physique d’intensité modérée par semaine. Une activité physique d’intensité modérée est définie comme nécessitant un effort modéré entraînant une augmentation modérée de la fréquence cardiaque. La danse, la marche rapide, le jardinage, les jeux avec les enfants ou la promenade des animaux domestiques en sont des exemples.

Nous faisons face à une épidémie de sédentarité dans le monde entier qui touche aussi bien les adultes que les enfants. Aux États-Unis et en Europe, le temps passé en sédentarité n’a cessé d’augmenter ces deux dernières décennies et devrait continuer à augmenter jusqu’en 2030. Le monde entier est concerné.

En Chine, une enquête sur la santé et la nutrition a évalué l’activité physique et le comportement sédentaire des adultes, et les résultats ont été similaires. L’activité physique a fortement diminué depuis les années 1990 et cette tendance devrait également se poursuivre jusqu’en 2030.

Que se passe-t-il dans le corps lorsque l’on pratique un exercice physique ?

Une des principales fonctions assurées par le corps est l’homéostasie, c’est-à-dire le maintien des niveaux de base des fonctions physiologiques nécessaires à la vie. La température corporelle, le pH du corps et la quantité de glucose en sont des exemples. À tout moment, le corps doit assurer des niveaux de carburant suffisants, généralement sous forme de glucose.

Le niveau de glucose est maintenu par un système de contrôle très sensible. Il est utilisé par une variété de tissus pour soutenir le métabolisme. Une grande partie du glucose est destinée au cerveau. Dans un état de repos normal, le glucose est libéré par le foie à partir de la dégradation du glycogène à un rythme équivalent à celui de l’absorption du glucose.

Lors de la pratique d’une activité physique, le foie est stimulé pour produire plus de glucose, ce qui permet de maintenir une glycémie stable. Si la production de glucose par le foie n’augmentait pas et que le muscle en consommait davantage, on se retrouverait en hypoglycémie ou avec une glycémie basse. Le foie doit également disposer de moyens efficaces pour reconstituer le glucose après l’exercice.

Ce résultat est obtenu par l’action du cerveau sur le foie. Pendant l’exercice, votre rythme cardiaque augmente, tout comme vos niveaux d’épinéphrine, d’adrénaline et de norépinéphrine. Le cerveau agit par le biais du système nerveux autonome pour augmenter vos niveaux de cortisol et d’épinéphrine. Cela influence le pancréas, qui stimule le foie pour qu’il produise davantage de glucagon, qui est la forme de stockage du glucose. De cette façon, les réserves du foie ne sont pas épuisées. Ainsi, pendant l’exercice, le taux de glucagon augmente et l’insuline diminue. 

Que se passe-t-il dans le cerveau lorsque l’on pratique un exercice physique ?

Pendant l’exercice, les muscles sécrètent diverses substances chimiques qui agissent comme des messagers en direction du cerveau. Il s’agit notamment de l’AMP cyclique et de l’irisine qui remontent jusqu’au cerveau et incitent ce dernier à produire davantage de sérotonine ou d’épinéphrine, qui agissent comme des neurotransmetteurs.

Outre les neurotransmetteurs, le cerveau commence également à produire ce que l’on appelle des facteurs de croissance. Il s’agit notamment de facteurs de croissance similaires à l’insuline ou IGF, du facteur de croissance endothélial vasculaire ou VEGF et du facteur neurotrophique dérivé du cerveau ou BDNF. Le BDNF est une protéine très importante, elle était relativement inconnue jusque dans les années 1990 mais il existe maintenant des milliers d’études sur ce sujet.

Nous savons maintenant que le BDNF provoque la croissance et la formation de nouveaux neurones, ou neurogenèse. Il favorise la potentialisation à long terme dans l’hippocampe, qui est le mécanisme moléculaire de l’apprentissage. Le BDNF agit même sur l’ADN des neurones pour provoquer une plus grande transcription des gènes qui favorisent la croissance du cerveau.

Si vous saupoudriez du BDNF sur des neurones dans une boîte de pétri, cela provoquerait la croissance de ces neurones. Le BDNF est en fait l’une des molécules les plus importantes examinées lorsqu’on observe les effets de l’exercice sur le cerveau. Certaines études ont montré que l’altération de la signalisation du BDNF était un facteur de la maladie d’Alzheimer, de la dépression et même de certains troubles alimentaires.


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Les études sur l’impact de l’activité physique chez les animaux

L’un des effets de l’exercice sur le cerveau est l’augmentation de la production de BDNF, ou facteur neurotrophique dérivé du cerveau (nous l’avons vu ci-dessus). Il a été démontré, dans de nombreuses études, que les rongeurs sédentaires présentent un faible taux de nouveaux neurones. Au contraire, les souris qui font de l’exercice ont un niveau accru de BDNF et ont donc de nouveaux neurones.

Dans une étude historique sur l’exercice et l’apprentissage, des souris ont été placées dans deux cages. Une des deux cages contenait une roue pour courir et une autre n’en contenait pas. Les souris adorent les roues pour courir. Elles peuvent courir pendant des heures et parcourir des distances qui se mesurent en kilomètres.

Les deux groupes de souris ont ensuite été placés dans un labyrinthe aquatique, elles étaient censées apprendre à nager jusqu’à une plate-forme sûre. En comparant le groupe des coureurs à celui des non coureurs, on a constaté que les souris qui couraient avaient davantage de nouveaux neurones. Elles ont également réussi à atteindre la plate-forme sûre et ont appris beaucoup plus rapidement que le groupe témoin. Ces résultats sont significatifs, même par rapport aux souris placées dans des cages enrichies, c’est-à-dire des cages contenant des jouets et des objets colorés, ce qui stimule le cerveau et favorise leur croissance.

Quel est le lien avec les niveaux de BDNF dans le cerveau ? Quelle est la relation entre les niveaux de BDNF et l’apprentissage ? Et de quelle quantité d’exercice parle-t-on ici ? Doit-il être quotidien ou l’exercice intermittent est-il suffisant ?

Dans une expérience, des rats de laboratoire ont été exposés à un exercice volontaire quotidien à l’aide d’une roue de course, tandis qu’un autre groupe n’avait accès à la roue que par intermittence, un jour sur deux. Les recherches ont montré que dans le groupe soumis à un exercice quotidien, la protéine BDNF dans le cerveau a augmenté de 174 % par rapport à son niveau initial. Et dans le groupe de l’exercice intermittent, elle est passée à 160 % de son niveau d’origine. Cette augmentation médiane s’est poursuivie pendant les 90 jours suivants.

Qu’arrive-t-il aux niveaux de BDNF après l’arrêt de l’exercice ?

Dans des expériences similaires, des rats ont été exposés à une course volontaire tous les jours ou en alternance. Puis les roues ont été bloquées et les animaux ont été analysés à différents jours après l’exercice. Cette expérience montre que les niveaux de BDNF diminuent progressivement. Il faut environ quatorze jours au groupe qui court quotidiennement et trois jours au groupe qui court de façon intermittente pour revenir à des niveaux non significatifs.

Dans une autre étude, un groupe d’animaux sédentaires a été soumis à une course à pied quotidienne qui a augmenté de manière significative les niveaux de BDNF. Même après seulement une semaine de repos, les quantités de BDNF sont revenues à des niveaux presque de base. Si l’animal recommence à courir, les niveaux de BDNF remontent à des niveaux presque similaires à ceux qu’il aurait atteints s’il n’avait jamais cessé de courir. Cet effet est également observé quand les animaux n’ont pas couru pendant deux semaines au lieu d’une. Cela prouve qu’il existe presque une mémoire du BDNF. Faire une pause ne sera pas aussi préjudiciable qu’on pourrait le penser.

Comment le BDNF agit-il sur le cerveau ?

Dans des expériences portant sur l’hippocampe, ou zone d’apprentissage du cerveau, les animaux qui faisaient de l’exercice avaient une augmentation du nombre de nouveaux neurones et plus l’exercice était important, plus le nombre de nouveaux neurones était élevé.

Non seulement le BDNF provoque la création de nouveaux neurones, mais il fait aussi en sorte que les neurones existants deviennent plus touffus et aient plus de branches dendritiques, ce qui signifie qu’ils sont plus efficaces. Ils deviennent plus aptes à apprendre et à éliminer les déchets : comme les protéines toxiques qui peuvent s’accumuler dans le cerveau et provoquer des maladies comme la maladie d’Alzheimer.

Des études portant spécifiquement sur la protéine amyloïde bêta dans le cerveau ont montré des bénéfices. La protéine amyloïde bêta est une protéine qui est éliminée par le cerveau lorsqu’il fonctionne normalement. On constate qu’elle s’accumule dans le cerveau des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Quand elle s’accumule, cette protéine devient toxique et tue les cellules cérébrales. Cet effet a été observé à la fois dans le cortex frontal et dans l’hippocampe, qui est le siège de la mémoire et des fonctions exécutives. Les mêmes résultats ont été constatés sur des modèles animaux de la maladie de Parkinson.

Les études sur l’activité physique chez les humains

Les effets de l’exercice physique sur les cerveaux en bonne santé

Une étude de très grande envergure, qui a suivi plus de 18 000 femmes âgées de 70 à 81 ans pendant 8 à 15 ans, a révélé qu’un niveau élevé d’exercice physique régulier à long terme était fortement associé à un niveau plus élevé de fonction cognitive. Les femmes qui faisaient régulièrement de l’exercice se comportaient comme si elles avaient trois ans de moins en moyenne. Et leur risque de souffrir de troubles cognitifs était inférieur de 20 %.

Les bénéfices tirés de l’exercice physique n’étaient pas limités aux femmes qui faisaient des exercices lourds et vigoureux. Les femmes qui faisaient une marche supérieure ou égale à une heure et demie par semaine, soit l’équivalent de faire deux fois le tour d’une piste standard en dix minutes par jour. Elles ont également constaté des bénéfices protecteurs contre le déclin cognitif.

Dans une autre étude, une hypothèse a été testée, à savoir que l’entraînement physique aérobie améliore la vitalité cognitive d’adultes âgés en bonne santé mais sédentaires. 18 études publiées entre 1966 et 2001 ont été incluses dans l’analyse. Plusieurs résultats théoriques et pratiques importants ont été obtenus.

L’exercice physique s’est avéré avoir des effets bénéfiques importants mais sélectifs sur l’état cognitif. Les plus grands avantages découlant de l’exercice physique se produisent dans les fonctions exécutives, comme la planification, la prise de décision et le multitâche. L’exercice a également montré des effets positifs sur la reconnaissance spatiale et la vitesse. Ces études ont montré un effet plus important chez les femmes et l’effet était le même chez les adultes en bonne santé et les adultes souffrant de troubles cognitifs.

Il existe des études portant spécifiquement sur les effets de l’exercice aérobie sur la cognition, la fonction cérébrale et la structure du cerveau chez les personnes âgées.

Dans une étude qui a duré six mois, les participants ont été scindés en deux groupes. Le premier groupe a dû marcher trois fois par semaine, et l’autre s’est étiré et a pratiqué des techniques de relaxation. Les fonctions cognitives et exécutives de tous les sujets ont ensuite été mesurées.

Le groupe de marche avait, en moyenne, un volume cérébral plus élevé que le groupe de relaxation. Cette augmentation a été observée davantage dans la zone cingulaire antérieure, qui est le siège du contrôle des émotions, ainsi que dans la matière grasse reliant les deux hémisphères. Ce qui montre peut-être une communication plus efficace entre les hémisphères. D’un point de vue neuropsychologique, le groupe de marcheurs a montré une meilleure attention et une meilleure mémoire. Et l’on pense que cette évolution est corrélée aux zones du cerveau dont le volume a augmenté. 

La même étude a été renouvelée, mais avec une durée d’observation qui a été portée à un an. Les sujets ont été répartis aléatoirement entre les deux groupes, deux ou trois fois par semaine, avec soit un programme de marche soit un programme de relaxation. Les performances cognitives des participants ont été mesurées et leur volume cérébral évalué.

Les résultats ont montré que le volume de l’hippocampe a augmenté de 2 %. Vous pouvez penser que cette augmentation n’est pas significative, mais en fait cette augmentation correspond à une inversion de la perte de volume liée à un vieillissement équivalent à deux ans.

Les effets de l’entraînement en résistance musculaire ?

Comment ce type d’entraînement affecte-t-il le cerveau ?

Nous savons que ce type d’entraînement présente de nombreux avantages autres que cérébraux, notamment sur la santé osseuse, ainsi que l’inversion de l’ostéoporose et de la sarcopénie, ou perte de tissu osseux.

Nous connaissons également ses effets sur les muscles, mais affecte-t-il le cerveau ? Dans une étude comparant l’effet d’un entraînement en résistance d’intensité modérée par rapport à un entraînement d’intensité élevée chez deux groupes de sujets âgés de 65 à 75 ans, le groupe effectuant un entraînement en résistance de haute intensité a montré une amélioration de la mémoire verbale et spatiale par rapport au groupe effectuant un entraînement d’intensité modérée. 

Dans une autre étude, où l’on a comparé l’entraînement en résistance avec des exercices d’équilibre, trois groupes de sujets ont été répartis entre un entraînement en résistance une fois par semaine, deux fois par semaine et un troisième groupe qui pratiquait des exercices d’équilibre deux fois par semaine. Ce groupe de sujets était composé de femmes âgées de 65 à 75 ans qui n’avaient jamais participé à un entraînement en résistance auparavant.

Ces participantes étaient toutes des femmes vivant en communauté et n’ayant aucun antécédent de maladie cérébrale comme un accident vasculaire cérébral (AVC) ou une maladie neurodégénérative. Le groupe d’entraînement en résistance a suivi 60 minutes de cours, dont 40 minutes d’entraînement en résistance avec des séries de huit répétitions, par rapport au groupe d’équilibre, qui a également fait 60 minutes d’exercice. Vous trouverez plus de détails sur les exercices effectués dans la partie Références (ci-dessous).

Le groupe qui a pratiqué des exercices de résistance a montré des améliorations significatives des fonctions exécutives après 12 mois d’entraînement. C’était le cas pour les deux groupes, que les participantes pratiquent des exercices de résistance une fois et deux fois par semaine.

Dans une étude plus récente publiée en 2018, un groupe suédois a publié des conclusions selon lesquelles une condition physique de modérée à élevée chez les femmes était associée à une diminution de 90% du risque de démence. Et même lorsque la démence est apparue, elle s’est produite en moyenne 11 ans plus tard que prévu.

Les effets de la pratique du yoga sur le cerveau

Nous savons que le yoga est un excellent exercice pour la connexion entre l’esprit et le corps parce qu’il est lui-même une sorte de méditation en mouvement, et parce qu’il inclut souvent une partie de méditation.

Il est bien connu que le yoga diminue l’hypertension, le stress, la dépression et l’anxiété. Dans une étude, des personnes qui pratiquaient le yoga pour la première fois ont été inscrites à un programme de 12 semaines. Leur physiologie cérébrale a été évaluée par des électro-encéphalogrammes. Les sujets qui ont suivi la formation au yoga ont montré une plus grande activité de l’hémisphère gauche, par rapport au groupe témoin.

Cet hémisphère est généralement associé à la bonne humeur et aux humeurs positives. L’étude a également montré une augmentation du flux sanguin dans le cortex préfrontal, qui est le siège de la fonction exécutive, notamment le jugement, la planification, etc. Les adeptes du yoga ont également constaté des changements au niveau de l’amygdale et du cortex sensori-moteur, où les phénomènes sensoriels et les émotions sont traités.

Une autre étude a comparé le déclin de la matière grise lié à l’âge chez les pratiquants de yoga et dans un groupe témoin. Dans cette étude, ils ont constaté que le groupe témoin présentait le déclin classique de la matière grise lié à l’âge, alors que ce n’était pas le cas chez les pratiquants de yoga, ce qui suggère que le yoga contribue à protéger le cerveau contre le déclin lié à l’âge. En outre, plus le temps passé à pratiquer le yoga est long, plus l’effet sur les volumes cérébraux est important.

Le nombre d’années passées à pratiquer le yoga était également corrélé aux différences de volume de matière grise dans l’hémisphère gauche, l’insula, les lobes frontaux et le cortex orbitofrontal.

Les résultats suggèrent également que le yoga oriente le cerveau vers des états plus positifs. Les analyses de l’étude ont conclu que la combinaison de postures dans la méditation était ce qui contribuait le plus à la taille de l’hippocampe et du lobe pariétal. Quant à la combinaison de la méditation et des exercices de respiration, elle a contribué le plus au volume du cortex visuel. Les effets neuroprotecteurs potentiels du yoga pourraient fournir une base neuronale à certains de ses effets bénéfiques.

Les effets de l’exercice physique sur des cerveaux endommagés

Nous avons évoqué les effets bénéfiques de l’exercice sur des personnes dont le cerveau est relativement sain et qui n’ont pas d’antécédents de troubles ou de maladies cognitives. Mais qu’en est-il des personnes qui ont déjà subi un accident vasculaire cérébral, voire une démence ou la maladie de Parkinson ? Est-il trop tard pour qu’elles puissent en bénéficier ?

Une étude qui a duré six mois a porté sur des femmes qui avaient été diagnostiquées une déficience cognitive légère (vous trouverez le lien vers cette étude dans les Références). Après avoir participé à un programme de marche quatre fois par semaine, elles ont constaté une amélioration de leurs mesures neuropsychologiques, notamment de leurs fonctions exécutives. En outre, elles présentaient une diminution des taux d’insuline, donc une meilleure sensibilité à l’insuline, et une réduction des taux de cortisol, réduisant ainsi le stress.

Dans l’étude Excel, qui signifie « exercise for cognition and everyday living » (exercice pour la cognition et la vie quotidienne), 86 femmes âgées de 70 à 80 ans et présentant des déficits cognitifs objectifs révélés par des tests neuropsychométriques ont été réparties au hasard dans trois groupes. Le premier groupe faisait un entraînement aérobique deux fois par semaine, le second un entraînement en résistance deux fois par semaine et le troisième un entraînement d’équilibre deux fois par semaine.

Après seulement six mois d’entraînement, les sujets du groupe de l’entraînement en résistance et de l’entraînement aérobique ont présenté une amélioration significative de leur attention et de leur prise de décision par rapport au groupe qui pratiquait des exercices d’équilibre.

Qu’en est-il de la cognition dans la maladie de Parkinson ?

La maladie de Parkinson est une maladie neurodégénérative qui affecte les neurones qui produisent la dopamine dans le cerveau. Elle se traduit par une perte lente et régulière des fonctions motrices et cognitives.

Il existe de multiples études montrant l’efficacité de l’exercice, en particulier le tai chi, dans la maladie de Parkinson. Presque toutes les études sont favorables au tai chi. Il a été démontré que le tai chi améliore l’échelle d’évaluation unifiée pour la maladie de Parkinson (UPDRS) qui mesure la fonction motrice. Il a également été démontré que les patients atteints de la maladie de Parkinson ayant des difficultés à initier des mouvements avaient de meilleurs scores et que leur vitesse, généralement ralentie par la maladie, était nettement améliorée.

Nosera Hitao a montré que l’exercice physique non seulement améliore le ralentissement de la fonction motrice, mais entraîne également une courbe moins raide du déclin cognitif. Cela a des effets bénéfiques sur la qualité de vie, en diminuant les chutes dues à un dysfonctionnement moteur, en augmentant l’indépendance dans les activités de la vie quotidienne et en ralentissant la progression de la démence qui peut accompagner la maladie de Parkinson.

L’exercice physique et l’AVC

Il est clair aujourd’hui que l’exercice physique prévient l’AVC, qu’il prévient ou inverse l’hypertension artérielle et le syndrome métabolique, qui est la combinaison de l’hypertension, du diabète, de l’hypercholestérolémie et de l’obésité.

On ne comprend pas complètement ce mécanisme, mais nous savons qu’il existe une relation dose-réponse entre l’activité physique et l’AVC, ce qui a été prouvé par l’analyse de l’association entre l’AVC et l’activité physique. Donc, plus vous faites de l’exercice, plus votre risque d’AVC est faible.

L’exercice physique après un accident vasculaire cérébral

Quelle est la place de l’exercice physique après un AVC ? Bien sûr, les AVC entraînent des handicaps physiques qui peuvent rendre l’exercice difficile et même parfois dangereux. Il doit être suivi et guidé par un professionnel comme un kinésithérapeute ou un ergothérapeute.

Un exercice de physiothérapie très bien étudié, appelé thérapie par le mouvement induit par la contrainte (TMIC), s’est avéré efficace pour réhabiliter les dysfonctionnements du bras. Le principe est le suivant : le bras valide ou non affecté est contraint, souvent dans une écharpe, afin que le bras faible soit forcé de bouger, d’apprendre et de se renforcer.

Cette thérapie spécifique permet non seulement d’augmenter la force du bras, ce qui est obtenu par d’autres modalités thérapeutiques, mais cette force se traduit également par une indépendance dans les activités de la vie quotidienne.

Un exercice mental important après un AVC est l’entraînement à l’équilibre et à la mobilité. L’AVC peut entraîner de graves handicaps lorsqu’il affecte vos jambes ou votre sens de l’équilibre. L’exercice aide à retrouver cet équilibre perdu et à retrouver un sentiment d’indépendance.

L’exercice après un AVC est également utile d’un point de vue cognitif. L’un des déficits post-AVC les plus débilitants est le déclin cognitif, qui touche jusqu’à 65 % des patients. La fatigue post-AVC touche également 40 à 77 % des patients. L’exercice physique aide dans ces deux domaines. Non seulement l’exercice aide à combler les déficits causés par l’AVC, mais il contribue à améliorer la qualité de vie et l’indépendance et peut également prévenir un autre AVC. L’exercice est donc un processus important qui doit être inclus dans la récupération post-AVC.

En résumé, l’entraînement physique a des effets clairs et positifs sur la cognition, tant chez les adultes vieillissant normalement que chez ceux atteints de démence précoce.

Les effets de l’entraînement cognitif sur le cerveau

Les patients hospitalisés, leurs familles et leurs amis demandent souvent aux médecins si les jeux vidéo, le Sudoku et d’autres activités similaires de type puzzle renforcent le cerveau et préviennent la démence. Regardons ce que disent les données et études scientifiques.

Existe-t-il des activités qui préviennent la démence ?

L’entraînement cognitif

L’entraînement cognitif est un ensemble d’exercices validés que les professionnels de la santé, tels que les kinésithérapeutes, les ergothérapeutes et les neuropsychologues, utilisent pour améliorer la fonction cognitive d’une personne, généralement après une lésion cérébrale. L’objectif de ces exercices est d’améliorer l’attention, la mémoire, le raisonnement et le jugement.

L’étude ACTIVE (Advanced Cognitive Training for Independent and Vital Elderly) a été le premier essai aléatoire à grande échelle à montrer que l’entraînement cognitif améliore la fonction cognitive chez les personnes âgées vivant en communauté, et à démontrer le transfert de cet entraînement dans la vie quotidienne. L’étude ACTIVE s’est concentrée sur la mémoire, le raisonnement et la vitesse de traitement, car des recherches antérieures ont montré que ces capacités présentent un déclin précoce lié à l’âge et sont liées aux activités de la vie quotidienne.

Les exercices ont été menés en petits groupes au cours de 10 séances de 60 à 75 minutes sur une période de 5 à 6 semaines. L’entraînement à la mémoire visait à améliorer la mémoire verbale et épisodique par l’enseignement et la pratique de l’utilisation de stratégies. L’entraînement au raisonnement visait à améliorer la capacité à résoudre des problèmes contenant un schéma sériel. L’entraînement à la vitesse de traitement se concentrait sur la recherche visuelle et la capacité à traiter des informations de plus en plus complexes et présentées dans des temps de plus en plus courts.

En résumé, l’étude ACTIVE a été le premier essai clinique multisite à tester les effets des interventions d’entraînement cognitif sur les capacités cognitives et les fonctions quotidiennes. Les résultats à dix ans démontrent que l’entraînement cognitif a des effets bénéfiques sur les capacités cognitives.

Ces résultats apportent un soutien au développement d’autres interventions, en particulier celles qui ciblent des capacités cognitives multiples. Les résultats de l’étude ACTIVE ont démontré que chacune des trois interventions d’entraînement cognitif, à savoir la mémoire, le raisonnement et la vitesse de traitement visuel, a eu un effet sur les résultats ciblés, proximaux et primaires à court et à long terme, sur des périodes de suivi d’un à cinq ans et même à dix ans.

Ces changements reflètent la restauration de l’équivalent de six ans de mémoire, quatre ans de raisonnement et huit ans de vitesse de traitement visuel, l’effet le plus important. Seule l’intervention sur la vitesse de traitement visuel a eu des effets significatifs sur une variété de résultats de santé, y compris la qualité de vie liée à la santé, les symptômes dépressifs et l’auto-évaluation de la santé, qui ont duré jusqu’à cinq ans.

Vous trouverez des détails sur les exercices d’entraînement cognitif dans la section Références (en langue anglaise).

Une étude intitulée « Iowa Healthy and Active Mind study » compare l’entraînement cognitif aux mots croisés. Elle a permis de remédier à certaines des limites de l’étude ACTIVE, en permettant notamment à des sujets plus jeunes de participer. Ils ont donc commencé à recruter des personnes âgées de 55 ans et plus et ils ont divisé les participants en quatre groupes.

  • Un groupe qui a suivi cinq sessions de formation de deux heures chacune sur place.
  • Un groupe qui a suivi une formation similaire, mais qui a bénéficié d’une session de rappel.
  • Un groupe à qui l’on a remis le logiciel et les instructions et à qui l’on a demandé de s’entraîner à la maison.
  • Un groupe de contrôle qui ne faisait que des mots croisés.

Cette étude était nouvelle, car elle comparait des utilisateurs plus âgés et plus jeunes. Elle a également comparé les utilisateurs à leur propre domicile et ceux dans un environnement supervisé. Et elle s’est intéressée aux mots croisés, un exercice auquel la plupart des gens pensent lorsqu’ils pensent à l’entraînement cérébral.

Les résultats de l’étude ont montré que le groupe utilisant l’exercice informatisé pendant seulement dix heures a enregistré des gains significatifs en termes de fonction cognitive, tandis que le groupe faisant des mots croisés sur l’ordinateur pendant une période égale n’a enregistré aucune amélioration significative. Le groupe ayant suivi une formation à domicile n’a enregistré aucune amélioration de sa fonction cognitive et de sa vitesse, mais le groupe ayant suivi une formation sur place et un rappel de quatre heures a obtenu les meilleurs résultats.

Les effets de l’engagement intellectuel chez les personnes âgées

Par « engagement intellectuel », on comprend la lecture, les travaux manuels comme le tricot, les intérêts politiques, les rencontres entre amis en groupe, le jardinage, les jeux de cartes, etc. Dans une étude suédoise réalisée par Carp, un total de 776 sujets non déments âgés de 75 ans et plus ont été suivis pendant plus de 6 ans afin de détecter les cas incidents de démence. On a demandé à ces sujets quels types d’activités ils pratiquaient, et un score de un à trois a été attribué à chaque activité.

L’étude a montré que plus le score était élevé, c’est-à-dire plus les personnes âgées pratiquaient d’activités, moins elles risquaient de développer une démence à terme. Ces résultats suggèrent que s’engager dans un large éventail d’activités est plus bénéfique que de s’engager dans un seul type d’activité.

N’oubliez pas cependant que l’entraînement physique a des effets à la fois généraux et spécifiques sur la cognition. Cela signifie qu’avec un seul exercice, vous pouvez cibler différents domaines, notamment la fonction exécutive, l’orientation spatiale et la vitesse, alors qu’avec l’entraînement cognitif, vous devez faire un exercice spécifique pour cibler chaque domaine spécifique.

L’activité physique et la santé du cerveau : que peut-on faire ?

Ces informations ont dû vous convaincre que les exercices physiques et cognitifs sont des outils puissants pour améliorer la santé de votre cerveau. Les données confirment que l’exercice aérobique, c’est-à-dire les exercices qui augmentent votre rythme cardiaque, est un ingrédient nécessaire car il augmente vos niveaux de BDNF.

Essayez d’ajouter à l’exercice aérobique un exercice de compétence comme le tennis ou le yoga, un exercice où la coordination est nécessaire pour aider votre cerveau à augmenter son apprentissage. D’une certaine manière, le BDNF participe à la construction de l’infrastructure nécessaire à l’apprentissage, mais vous devez y ajouter une compétence d’apprentissage.

Des études ont montré qu’en faisant de l’exercice physique avant de faire des exercices de mathématiques, les enfants augmentent leurs notes de 20 %. Nous avons trop peu de données sur les exercices tels que le Sudoku et les mots croisés, aujourd’hui, pour qu’on puisse juger de leur efficacité. Cependant, il existe des données qui soutiennent que l’entraînement cognitif est un outil qui permet d’accroître les capacités spécifiques d’un domaine.

Références

Carte du globe (2010) réalisée par l’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS) et qui présente l’inactivité physique par pays : http://gamapserver.who.int/mapLibrary/Files/Maps/Global_InsufficientActivity_Adults_BothSexes_2010.png

Article en langue anglaise qui porte sur le fait que l’exercice favorise l’expression du facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF) par l’action du corps cétonique β-hydroxybutyrate : https://elifesciences.org/articles/15092

Article (en langue anglaise) sur une étude qui a porté sur l’activité physique, y compris la marche, et fonction cognitive chez les femmes âgées : https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/199487

Article (en langue anglaise) dans « Pyschology Today » du 14 novembre 2017 et intitulé « Une fois pour toutes : L’exercice aérobique augmente la taille du cerveau ». L’article rapporte qu’une méta-analyse confirme que l’exercice aérobie agit comme un « engrais » pour le cerveau humain. https://www.psychologytoday.com/us/blog/the-athletes-way/201711/once-and-all-aerobic-exercise-increases-brain-size

Article (en langue anglaise) dans « Pyschology Today » du 30 novembre 2016 et intitulé « Étude : L’exercice aérobie entraîne des changements cérébraux remarquables ». https://www.psychologytoday.com/us/blog/the-athletes-way/201611/study-aerobic-exercise-leads-remarkable-brain-changes

Article publié le 1er mars 2014 sur la manière dont le yoga modifie notre cerveau : https://www.scientificamerican.com/article/how-yoga-changes-the-brain/

Etude publiée en janvier 2010 qui porte sur des adultes de plus 55 ans atteints de légères déficiences cognitives et qui suive un programme de marche quatre fois par semaine. L’article s’intitule « Effets de l’exercice aérobique sur la déficience cognitive légère » :

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3056436/

Article sur l’essai clinique EXCEL (Exercise for Cognition and Everyday Living for Seniors With Memory Complaints) et publié le 13 août 2009 :

https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT00958867

Article publié le 24 mars 2016, intitulé « L’exercice intensif peut retarder le déclin cognitif de 10 ans » qui porte sur deux analyses d’une même étude.

https://www.medscape.com/viewarticle/860930

Etude publiée en août 2013 intitulée « L’exercice du tai-chi améliore les symptômes non moteurs de la maladie de Parkinson » :

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3837454/

Article de blog (en langue anglaise) de la « Harvard Medical School », publié le 3 mai 2013 et intitulé « Le tai chi améliore l’équilibre et le contrôle moteur dans la maladie de Parkinson » : https://www.health.harvard.edu/blog/tai-chi-improves-balance-and-motor-control-in-parkinsons-disease-201305036150

Article (en langue anglaise) de la « American Heart Association », publié le 4 novembre 2014 et intitulé « Activité physique et exercice après un accident vasculaire cérébral » : https://www.ahajournals.org/doi/full/10.1161/STROKEAHA.114.004311

Publication sur l’étude ACTIVE (Advanced Cognitive Training for Independent and Vital Elderly) et intitulée « L’étude ACTIVE : Aperçu de l’étude et principales conclusions » :

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3934012/

Publication sur l’étude Iowa Healthy and Active Minds Study (IHAMS) qui a succeed à ACTIVE :

https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT01165463

Etude suédoise sur une population de plus 75 ans et intitulé « Activités mentalement stimulantes à l’œuvre au cours de la quarantaine et risque de démence après 75 ans : étude de suivi du projet Kungsholmen » :

https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19454849/


J’ai regroupé ici mes articles sur la mémoire chez les seniors.
Retrouvez mes autres articles utiles sur l’hygiène de vie.

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